L’Ordre de Mission
En 1933, le Ministre de l’Air Pierre Cot décide de faire accomplir un voyage d’escadre en Afrique Française. Ce voyage aurait pour but :
- De relier toutes les possessions françaises de l’Afrique du Nord et du Nord Ouest pour porter un commun salut de la métropole,
- De souligner, en empruntant un certain nombre de routes militaires déjà organisées, leur degré d’achèvement en vue d’une utilisation ultérieure par des lignes civiles,
- D’éprouver le matériel sur un long périple (25 000 km) car les avions n’avaient pas d’abri aux escales et les mécaniciens ne disposaient pas d’ateliers de réparations ni de rechanges sur la plupart des terrains étapes,
- De récompenser les officiers et sous-officiers se distinguant entre leurs pairs par leur mérite et leur valeur morale, professionnelle et technique.
L’ordre de mission fut confié au Général Vuillemin qui connaissait parfaitement l’Afrique Noire. Il en assura l’organisation et prendra par la suite le commandement de l’escadre.
La Croisière Noire (autre nom de la Croisière Africaine) se déroula du 8 novembre 1933 au 15 janvier 1934.
L’escadre de la Croisière Noire
30 officiers tous pilotes mais dont certains se virent confier des fonctions spécialisées de navigation, de télécommunications et de photographies et 30 sous-officiers pilotes ou mécaniciens furent désignés.
Ainsi, ce sont 30 avions qui seront du voyage. Mais suite à des accidents lors d’atterrissages, 2 avions durent abandonner. Les 28 autres appareils parcoururent avec succès l’ensemble de l’itinéraire.
La cellule de base est constituée de trois avions. Elle comprend obligatoirement trois officiers chefs de bord, dont l’un est chef de cellule, et deux sous-officiers mécaniciens. Deux des officiers remplissent les fonctions de pilote, le troisième d’observateur-navigateur.
Elle est indivisible, car c’est la plus petite unité capable d’assurer avec son personnel et le matériel de rechange réparti entre ses avions, sa sécurité en vol et son entretien.
L’insigne choisi pour l’escadre est la cocotte, symbole de l’escadrille du général Vuillemin pendant la Grande Guerre. Le groupe de tête arbore une cocotte rouge, le premier groupe une cocotte blanche, et le second une cocotte bleue. Il s’agit bien de montrer les couleurs françaises.
Quant à l’origine de la cocotte comme insigne de l’escadrille 11, l’explication en est donnée par le document ci-contre (origine inconnue)
Pour en savoir plus : lire ‘’Les hommes’’, (Bulletin technique des avions H.Potez n°20, 4ème trimestre 1933, dédié à la Croisière Noire).
Le matériel
Le Potez type 25 T.O.E.équipé d’un moteur Lorraine de 450 CV était parfaitement adapté à ce type de mission. En effet, il possédait un rayon d’action suffisant pour accomplir certaines étapes imposées par l’infrastructure de l’Afrique.
D’autre part, le personnel au sol en service dans les unités d’Afrique du Nord et d’Afrique Noire pouvait apporter une aide précieuse aux équipages lors de certaines étapes.
La préparation exigea plus de 5 mois de travail.
Quelques modifications techniques ont été apportées aux 28 appareils à savoir :
- Au niveau moteur
- Parkérisation de toutes les chemises d’eau des cylindres,
- Remplacements des canalisations rigides des divers circuits : eau, essence, huile par des tuyauteries souples en caoutchouc armé,
- Au niveau du train d’atterrissage et des béquilles. Adjonction d’amortisseurs oléopneumatiques et de freins sur les roues du train actionnables par le pilote afin de rendre plus aisée l’utilisation des terrains courts,
- Installation d’un poste TSF émetteur/récepteur et de son groupe auxiliaire (un poste et son groupe par cellule indivisible de 3 avions),
- Aménagement pour :
- Réserver la place nécessaire aux bagages de l’équipage pour un voyage de 45 jours,
- Embarquer de l’eau potable et des vivres, des armes et munitions, des engins pyrotechniques de signalisation,
- Embarquer les pièces de rechange du moteur réparties sur 3 avions formant une cellule indivisible.
Schémas du coffre d’outillage validés par le Colonel Bouscat (bras droit du Général Vuillemin)
Pour en savoir plus :
- Lire ‘’Le matériel’’, (Bulletin technique des avions H.Potez n°20, 4ème trimestre 1933, dédié à la Croisière Noire),
- Lire ‘’La préparation’’, (Bulletin technique des avions H.Potez n°20, 4ème trimestre 1933, dédié à la Croisière Noire).
Les étapes de la Croisière Noire
L’itinéraire est constitué de 38 étapes, pour une distance totale 25 000 km.
Etape | Date | Temps de vol (d’après le carnet de vol du Colonel Girier) |
Istres-Perpignan Perpignan-Los Alcazares | 8 novembre | 1h35 4h35 |
Los Alcazares-Rabat | 9 novembre | 6h00 |
Rabat-Colomb Bechar | 11 novembre | 3h20 |
Colomb Bechar-Adrar | 12 novembre | 3h10 |
Adrar-Bidon V | 13 novembre | 4h45 |
Bidon V-Gao | 14 novembre | 3h15 |
Gao-Mopti Mopti-Bamako | 16 novembre | 3h40 3h40 |
Bamako-Kayes | 19 novembre | 3h00 |
Kayes-Dakar Dakar-St Louis | 20 novembre | 5h10 1h20 |
St Louis-Kayes | 23 novembre | 4h20 |
Kayes-Segou | 24 novembre | 5h00 |
Segou-Oagadougou | 25 novembre | 4h15 |
Ouagadougou-Niamey | 26 novembre | 3h45 |
Niamey-Zinger | 29 novembre | 5h40 |
Zinger-Fort Lamy | 30 novembre | 5h30 |
Fort Lamy-Fort Archambault | 1er décembre | 3h30 |
Fort Archambault-Bangui | 2 décembre | 4h25 |
Bangui-Fort Archambault | 5 décembre2 | 4h10 |
Fort Archambault-Fort Lamy | 6 décembre | 3h10 |
Fort Lamy-Zinder | 7 décembre | 4h00 |
Zinder-Niamey Niamey-Gao | 8 décembre | 4h20 2h15 |
Gao-Bidon V Bidon V-Adrar | 12 décembre | 4h15 4h05 |
Adrar-El Golea | 13 décembre | 2h30 |
El Golea-Touggourt | 14 décembre | 2h50 |
Touggourt-Tunis | 15 décembre | 3h20 |
Tunis-Alger | 18 décembre | 4h40 |
Alger-Oran | 21 décembre | 2h40 |
Oran-Meknes | 22 décembre | 3h20 |
Meknes-Los Alcazares | 23 décembre | 4h15 |
Los Alcazares-Perpignan Perpignan-Istres | 24 décembre | 3h50 1h15 |
Istres-Lyon | 7 janvier 1934 | 1h40 |
Lyon- Etampes | 10 janvier | 2h55 |
Etampes-Le Bourget | 15 janvier | 0h45 |
Pour en savoir plus :
- Lire : l’article ‘’La croisière’’, (Bulletin technique des avions H.Potez n°20, 4ème trimestre 1933, dédié à la Croisière Noire),
- Lire : ‘’la croisière aérienne de l’escadre Vuillemin’’, édité par la Société Moteurs Lorraine
- Voir : Carnet de vol du Colonel Girier,
- Lire : Le discours du Général Vuillemin à la Sorbonne
Le retour
A son arrivée à l’aéroport du Bourget, l’escadre de la Croisière africaine fut accueillie triomphalement. Le succès est total.
Le Général Vuillemin est décoré lors de la manifestation qui se déroule au Bourget, et une réception est organisée à la Mairie de Paris.
Une plaque commémorative nominative est remise à chacun des participants.
Enfin, les cocottes, insigne de la Croisière Noire, sont omniprésentes, comme pour cette invitation au bal de l’aviation qui rappelle que ‘’le port de l’insigne des 3 cocottes est obligatoire’’, ou encore ces bijoux montrant les cocottes.
Photos de la Croisière Noire
(cliquez sur l’image pour agrandir)